Emprunts toxiques : une première victoire symbolique !

La métropole nîmoise avait accepté de régler 10 millions d'euros d'un emprunt toxique qu'elle avait contracté en 2008. Elle acceptait en outre de verser 58,6 millions d'euros d'indemnité. Tout cela pour le plus grand profit des banques. Plainte avait été déposée par 2 élus du Front de Gauche, le CAC 30 et un collectif d'audit citoyen. Le tribunal administratif de Nîmes administratif a jugé que les délibérations nîmoises étaient insuffisamment justifiées. Elles devront être revotées et la métropole nîmoise devra faire preuve de plus de transparence. Malheureusement la Cour n'est pas allée jusqu'à invalider le plan de remboursement. Mais tout n'est pas encore joué.


Le gouvernement feint de vouloir lutter contre la fraude fiscale

Aujourd’hui, Gérald Darmanin va présenter en conseil des ministres son « plan de lutte contre la fraude fiscale ». Au delà de l’effet d’annonce, ce projet prévoit de s’attaquer surtout aux « petits » fraudeurs en oubliant les multinationales et l’évasion fiscale.

Selon Raphaël Pradeau, porte-parole d’Attac, « cette loi ne nous prémunira en rien contre de nouveaux scandales : les Paradise Papers ont montré que c’est l’optimisation fiscale agressive et légale des multinationales qui est le principal problème, or le plan d’action du gouvernement ne s’y attaquera pas. »

Pour Dominique Plihon, porte-parole d’Attac : « le Ministre a d’ores et déjà annoncé vouloir « renforcer les sanctions » et la « pression sur les fraudeurs fiscaux » par la création d’une « police fiscale ». Pourtant, l’administration en charge de la lutte contre la fraude fiscale s’est vue sévèrement diminuée : 3100 emplois dans les services de contrôle de la DGFiP ont été supprimés depuis 2010, soit près d’un quart des effectifs ! »

Pour lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales, Attac revendique :

  • la mise en place du reporting public pays par pays ;
  • l’instauration d’une taxe globale sur les multinationales ;
  • le renforcement de l’ensemble des maillons de la chaine de l’administration fiscale, via la création de 10 000 postes de contrôle supplémentaires ;
  • la suppression du verrou de Bercy, véritable obstacle à la poursuite des fraudeurs fiscaux.

Reflet de cette stratégie de communication qui n’agit qu’en parole contre la fraude fiscale, au même moment se discute en procédure accélérée à l’Assemblée Nationale la transposition de la directive européenne « secret des affaires » visant à limiter les possibilités pour les citoyen.ne.s, journalistes et lanceurs/euses d’alerte, d’enquêter ou d’informer sur les pratiques et abus des multinationales.


Taxe sur le chiffre d'affaires des multinationales : une fausse bonne idée.

Les multinationales doivent payer leur juste part d’impôts dans tous les pays où elles exercent leurs activités !

Le sentiment d’injustice lié à l’évasion fiscale massive pratiquée par les multinationales, notamment celles du numérique, ne cesse de progresser dans nos sociétés. Suite au scandale des « Paradise papers » et sous la pression citoyenne, les gouvernements et la Commission européenne se sentent obligés de réagir. Sur proposition de la France, une taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises du numérique à un taux de 3% vient d’être proposée par la Commission européenne. Selon les estimations, elle pourrait générer des rentrées fiscales de 5 milliards d’euros par an.

Derrière ce volontarisme affiché, notamment par Bruno Le Maire, notre ministre de l’Economie et Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques et financières, cette proposition a tout de la fausse bonne idée. Selon une étude du Financial Times [1] publiée en mars dernier, le taux d’imposition des multinationales a baissé de 9 % depuis la crise financière de 2008. La taxe sur le chiffre d’affaires entérine à sa manière ce statut privilégié des multinationales alors qu’elles devraient payer leurs impôts comme tout le monde. D’autre part, de nombreuses entreprises, notamment les plateformes numériques, comme Amazon ou Netflix, échappent à cette taxe. Comme la mise en place de la liste noire des paradis fiscaux, la réponse de l’Union Européenne est de l’affichage politique : il s’agit de montrer qu’elle agit, mais en réalité elle crée un dangereux précédent pour l’équité fiscale.

Depuis plusieurs années, Attac mène des actions pour dénoncer l’impunité fiscale dont jouissent des multinationales comme Apple ou BNP Paribas. Pour nous, les multinationales doivent payer leur juste part d’impôts dans les pays où elles exercent leurs activités. Au niveau de l’Union Européenne, deux conditions doivent être réunies pour y arriver. D’abord une harmonisation des bases fiscales, en s’appuyant sur la directive ACCIS, incluant les activités numériques, qui vient d’être votée au Parlement européen. Ensuite, l’instauration d’un taux d’imposition minimum sur les profits réalisés dans l’UE pour stopper la course actuelle à la baisse de ces taux.

La France et tous les pays qui le souhaitent, devraient surtout initier une transformation en profondeur de l’imposition des multinationales. Attac défend l’idée d’une taxe globale sur des multinationales qui pourrait être le socle d’une nouvelle donne mondiale, où les paradis fiscaux et la concurrence fiscale n’auraient plus leur place. Également appelée « taxation unitaire », son objectif est de taxer les bénéfices mondiaux des multinationales sur la base d’indicateurs de leur activité réelle dans chaque pays. Elle contribuerait à immuniser durablement le système fiscal contre les transferts artificiels de bénéfices vers les paradis fiscaux. Pour éviter tout blocage lié à la règle européenne désastreuse de l’unanimité en matière fiscale, ces réformes pourraient être engagées dans le cadre d’une coopération renforcée initiée par la France et l’Allemagne.

P.-S.


Procès #AppleContreAttac : Apple condamnée, Attac agit pour « l’intérêt général »

vendredi 23 février 2018, par Attac France

L’ordonnance de référé opposant Apple à Attac a été rendue ce vendredi 23 février 2018 : Apple est déboutée de l’ensemble de ses demandes et est condamnée à verser 2 000 € à Attac !

Ce jugement était rendu à la suite d’une assignation en référé déposée par Apple devant le tribunal de grande instance de Paris pour empêcher toute future action d’Attac dans ses magasins. Le jugement du tribunal est limpide : « La simple pénétration de militants dans l’enceinte du magasin Apple Store Opéra, ou dans d’autres magasins situés en France, sans violence, sans dégradation, et sans blocage de l’accès du magasin à la clientèle, ne suffit pas à caractériser un dommage imminent justifiant de limiter le droit à la liberté d’expression et à la liberté de manifestation des militants de l’association Attac, qui agissaient conformément aux statuts de l’association, et dans le cadre d’une campagne d’intérêt général sur le paiement des impôts et l’évasion fiscale. »

Alors que l’évasion fiscale pratiquée par Apple affaiblit les finances publiques, il aurait été scandaleux que la justice protège Apple et condamne une association qui défend l’intérêt général, avec des actions citoyennes non violentes. Au final, non seulement les accusations d’Apple sont rejetées en bloc, - Apple « parle des “actes de vandalisme”, ou des actions ayant mis en péril la sécurité des employés et des clients […] sans en justifier par la production de pièces probantes » -, mais le tribunal confirme le caractère d’intérêt général de la campagne d’Attac.

Comme le rappelle Dominique Plihon, porte-parole d’Attac France : « nos actions visent à ce qu’Apple, la plus grande multinationale du monde, paie sa juste part d’impôts dans les pays où elle exerce réellement ses activités et accepte le redressement fiscal de 13 milliards d’euros que lui réclame la Commission européenne en retirant son recours devant la Cour de justice de l’Union européenne. »

Pour Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France : « Avec la campagne #ApplePayeTesImpôts, nous avons constaté un ras-le-bol de la grande majorité de la population face à l’impunité fiscale des ultra riches et des multinationales. Au rassemblement du 12 février devant le TGI de Paris, l’ensemble des représentant·e·s associatifs, syndicaux et politiques ont accueilli positivement l’idée d’une “alliance pour la justice fiscale”. Ce jugement est donc un encouragement à poursuivre et amplifier la mobilisation pour que les multinationales paient enfin leur juste part d’impôts. »

Les militant·e·s d’Attac attendent sereinement un éventuel appel d’Apple et vont désormais consacrer toute leur énergie à la préparation de nouvelles actions pour la justice fiscale, notamment à l’occasion de l’examen du projet de loi contre la fraude fiscale prévu avant cet été. Attac invite d’ores et déjà à se mobiliser pour le procès de Nicole Briend le 7 juin à Carpentras (suite à une plainte de BNP Paribas) et pour les 20 ans de notre association prévus le 2 juin prochain à la Bellevilloise à Paris.

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Délibéré du procès #Apple contre ATTAC rendu le 23 février 2018
delibere procès apple 21 décembre 2017.p
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Procès #AppleContreAttac : les multinationales ne nous feront pas taire !

Ce lundi 12 février à 13h30, Attac était convoquée devant le tribunal de grande instance de Paris à la suite d’une assignation en référé déposée par Apple. La raison : empêcher de dénoncer l’évasion fiscale qu’organise la multinationale et, en particulier, interdire les futures actions dans les Apple Store, telles que celles menées le 2 décembre 2017. Ce procès a permis la tenue d’un rassemblement politique, syndical, associatif très large appelant à la création d’une « alliance pour la justice fiscale ». Le délibéré sera rendu le 23 février.

Avec la campagne #ApplePayeTesImpôts, Attac dénonce l’évasion fiscale massive pratiquée par la marque à la pomme, exige le versement définitif de l’amende de 13 milliards d’euros infligée par la Commission européenne et demande à Apple de payer sa juste part d’impôts.
Le même jour, s’ouvrait le procès en appel de Jérôme Cahuzac pour blanchiment de fraude fiscale. A nouveau, si cet homme se retrouve devant les tribunaux c’est grâce au courage et au travail des journalistes et des lanceurs d’alerte. Mais plutôt que le procès d’un homme, c’est surtout le procès de l’évasion fiscale qu’il faut mener.

Pour Dominique Plihon, porte-parole d’Attac France : « Alors que nos actions sont systématiquement symboliques, à visage découvert, non-violentes et sans aucune dégradation matérielle, il est profondément scandaleux qu’Attac se retrouve sur le banc des accusés et non pas Apple qui continue à pratiquer une évasion fiscale massive. »

Avant le procès, un rassemblement de soutien à Attac s’est tenu face au TGI de Paris avec notamment Isabelle de Almeida (PCF), Clémentine Autain (Ensemble/France insoumise), Olivier Besancenot (NPA), Eric Beynel (Solidaires), Sophie Binet (CGT), Eric Coquerel (Parti de gauche/France insoumise), Robert Crémieux (MNCP), Susan George (présidente d’honneur d’Attac France), Yannick Jadot (EELV), Jean Lubin (DAL), Emmanuel Maurel (PS), Jean-Luc Mélenchon (France Insoumise), Emmanuel Poilane (CRID), Véronique Ponvert (FSU) et Miguel Urban (Podemos). Les intervenant.e.s ont rappelé leur soutien à Attac et dénoncé fermement la recrudescence des procédures bâillons intentées par des multinationales qui visent à museler la société civile.

« Alors que les associations, les lanceurs et les lanceuses d’alertes, les journalistes agissent dans l’intérêt général en révélant des scandales fiscaux, environnementaux, sanitaires, les procédures bâillons pour les faire taire constituent un véritable coup d’état démocratique » dénonce Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France.

Les centaines de citoyen.ne.s, responsables associatifs, politiques et syndicaux, présents lors du rassemblement, ont participé à une action visuelle appelant à la création d’une large « alliance pour la justice fiscale ».

Pour Raphaël Pradeau, porte-parole d’Attac France : « face aux effets dévastateurs de l’évasion fiscale sur la démocratie et les finances publiques, l’action d’Attac est indispensable pour que cesse l’impunité dont jouissent les multinationales et les ultra-riches », et de conclure « les multinationales ne nous feront pas taire ! »

P.-S.

Photo : Mélanie Poulain


La finance verte est-elle vraiment verte ?

Attac France publie un nouveau rapport intitulé « La finance verte est-elle vraiment verte ? ». L’analyse du fonctionnement du marché des obligations vertes montre que ce nouvel instrument financier n’apporte pas assez de garantie et ne permet pas d’exclure le financement de projets qui ne sont pas climato-compatibles. Nous appelons les pouvoirs publics à réguler en urgence le marché et à agir pour rendre l’ensemble du marché obligataire mondial « vert ».

Les financements nécessaires pour mettre en œuvre la transition énergétique mondiale, rendre l’économie mondiale soutenable et faire face aux conséquences des dérèglements climatiques sont colossaux. Ils sont généralement estimés dans une fourchette allant de 2 à 5% du PIB mondial, soit plusieurs milliers de milliards de dollars annuels. Estimation qui ne tient pas compte de l’ensemble des Objectifs du développement durable (ODD), adoptés par l’Assemblée générale des Nations-Unies en septembre 2015 : leur réalisation implique de débloquer d’importants financements additionnels pour des secteurs qui en sont faiblement dotés tels que l’accès à l’eau, la protection des populations et de l’environnement ou la santé. Ces besoins interviennent dans un contexte de disette budgétaire et de désengagement progressif des États qui se limitent souvent à renommer « climat » des financements historiquement dévolus à l’aide au développement.

La transition énergétique mondiale implique donc un transfert massif des investissements jusqu’ici orientés vers les secteurs industriels dépendant des énergies fossiles vers des secteurs climato-compatibles tels que les énergies renouvelables ou l’efficacité énergétique. Si l’on en croit les dernières données disponibles, le défi est de taille puisque les investissements dans les énergies renouvelables étaient en baisse de 23 % en 2016, tombant à 242 milliards d’euros, soit leur niveau de 2010. Tandis que les investissements dans les énergies fossiles, bien qu’en baisse également, représentaient encore 708 milliards de dollars en 2016, soit 42% de l’ensemble des investissements dans le secteur de l’énergie. En 2016, chaque fois que l’économie mondiale a investi un dollar dans les énergies renouvelables, trois dollars l’ont été dans les énergies fossiles.

L’un des principaux défis est donc d’utiliser les leviers politiques, économiques et financiers, qu’ils soient déjà disponibles ou qu’ils faillent les inventer, pour accélérer sans attendre une transition vers des investissements sobres en carbone. « Shifting the trillions » – déplacer les milliers de milliards de dollars – répondent en cœur les promoteurs de la « finance verte » qui explique que la création de nouveaux marchés et outils financiers verts vont permettre de relever ce défi.

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Le lobby tour des militants d'Attac à la défense



Réaction d'ATTAC FRANCEaux annonces d'ECOFIN

L’annonce par le Conseil des ministres des finances européens d’un « accord politique » sur le projet de coopération renforcée en matière de taxe sur les transactions financières ne saurait masquer le caractère imprécis et inapproprié des propositions concrètes que cet accord comporte. C’est un accord sur le principe, qui repousse à juin 2016 – minimum – toute décision et peut-être à 2018 toute collecte du produit de la taxe. C’est un nouvel engagement présidentiel qui ne verra pas le jour avant fin 2017.

Pour Dominique Plihon, économiste spécialiste des questions financières et porte-parole d’Attac France, « nous sommes frappés par les nombreuses exemptions existantes et les possibilités données aux États d’appliquer une taxe à la carte, mettant en danger le rendement potentiel de la taxe et donc la possibilité de financer les politiques en réponse aux urgences auxquelles nous faisons face ». « C’est le refus d’une taxe ambitieuse telle que l’avait appelée François Hollande le 5 janvier dernier ainsi que le refus de s’attaquer à la spéculation financière, ce qui est pourtant l’un des objectifs majeurs d’une telle taxe » rajoute-t-il.

Pour Maxime Combes, économiste et porte-parole d’Attac France sur les enjeux climatiques, « c’est une décision en demi-teinte qui caractérise le manque d’ambition politique des gouvernements des pays européens et le lobbying intense exercé par les lobbies bancaires et financiers ». « Cette décision est une occasion manquée : il existait une opportunité historique pour les États européens de délivrer un signal positif et ambitieux en pleine COP 21, alors que les financements manquent cruellement »


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D'où vient la dette grecque ? Quelles évolutions possibles ? Des dettes ont-elles déjà été annulées par le passé.
Un document écrit par Robert Joumard membre d'ATTAC Rhône et du Conseil scientifique d'ATTAC
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Sept ans après le début de la crise, les banques restent des dangers publics!

par Dominique Pilhon   Mardi 10 février 2015

Le discours officiel, véhiculé par la plupart des médias, est clair : la crise est passée, des réformes salutaires ont été mises en place, les banques vont bien et participent activement au bien-être de la société. Cette vision est contraire à la réalité.

À chacun sa vérité !

Des banques solides ?


   Les banques françaises sont « universelles » : elles sont à la fois banques de détail, tournées vers la distribution du crédit et la collecte des dépôts, mais également banques d’investissement, qui utilisent les dépôts de leurs clients – le plus souvent à leur insu – pour opérer sur les marchés et spéculer. Ce qui en fait des banques très risquées et gigantesques : le bilan de BNP Paribas fait 2 000 milliards d’euros, soit l’équivalent du PIB de la France ! A la suite de la crise, les autorités bancaires ont repéré les banques dites « systémiques », jugées les plus dangereuses pour la stabilité du système bancaire international, en raison de leur taille et des relations d’interdépendance existant entre elles. Sur les 29 groupes bancaires systémiques dans le monde, 4 sont français : Crédit Agricole, BNP Paribas, Société Générale et le groupe BPCE (Banques populaires – Caisses d’épargne). Ce qui place la France au 1er rang dans le monde… ex æquo avec la Chine ! Ces quatre banques systémiques contrôlent la majeure partie de l’activité bancaire en France et font donc du système bancaire français le plus vulnérable potentiellement, donc le plus dangereux dans le monde !


Les banques ne coûtent rien à la société ?


   Le patronat bancaire affirme que le sauvetage des banques à partir de 2008 n’a rien coûté au contribuable. Autre contre-vérité ! En 2012, la Commission européenne évalue à 4 500 milliards d’euros les fonds publics mis à disposition des banques européennes, principalement sous forme de garanties. Soit 37 % du PIB de l’Union européenne ! Le plus souvent sans conditions. La France ne fait pas exception. En 2008, l’État mobilise 360 milliards d’euros pour aider les banques nationales, dont 320 milliards de garanties. C’est plus que le budget annuel de l’État français ! Les prêts seront finalement remboursés par les banques. Mais trois ans plus tard, la Banque centrale européenne (BCE), via la Banque de France, est contrainte de prendre le relais pour prêter à nouveau aux banques françaises en manque de liquidités, à hauteur de 232 milliards d’euros. Ce qui fait de nos banques nationales les principales bénéficiaires du soutien de la BCE, juste derrière les banques espagnoles et italiennes.

Mais si on veut évaluer le coût des banques pour les contribuables, il faut aussi regarder du côté de la fiscalité. On constate d’abord que les grandes banques françaises ont un taux d’imposition sur les bénéfices de 8 %, très loin du taux officiel de 33,5 %, ce qui représente un manque à gagner pour l’État de 15 milliards d’euros au cours de la dernière décennie. Mais surtout, on découvre que l’une des activités les plus lucratives des banques est « l’optimisation fiscale », pour leur compte et celui de leurs clients. Les banques françaises sont des acteurs majeurs de « l’industrie de l’évasion fiscale » qui fait perdre au minimum 60 milliards d’euros chaque année au budget de la France. Ce n’est pas un hasard si BNP Paribas, championne dans ce sport, détient plus de 300 filiales dans les paradis fiscaux !


Les banques financent-elles encore l’économie ?


   Aujourd’hui en Europe, 10 %, en moyenne, des actifs des banques sont consacrés à des prêts aux entreprises. Et 15 % à des prêts aux ménages. Les 75 % restants se retrouvent surtout en placements sur les marchés financiers. Un quart seulement des actifs des banques sert donc à financer directement les entreprises et les particuliers ! En fait, les banques jouent désormais un simple rôle de « courtier » : elles se contentent de distribuer les crédits (moyennant commissions) qu’elles transfèrent ensuite aux marchés par la titrisation, qui consiste à transformer les crédits en titres négociables. On se dirige ainsi vers le modèle états-unien originate to distribute, qui est encouragé par les autorités françaises et européennes : les banques initient les crédits, prennent des commissions, puis transfèrent les risques aux marchés. Ainsi, les banquiers renoncent progressivement à leur fonction principale, qui est de prêter à l’économie et de gérer les risques. Par contre, ils développent leurs activités spéculatives tous azimuts. Ils se sont ainsi rués sur les produits dérivés, instrument phare de la spéculation. Et c’est à nouveau BNP Paribas qui fait la course en tête : ses activités de marché représentent l’équivalent de 42 % du PIB de la France, contre 2 % pour le groupe Crédit Mutuel. Ses produits dérivés représentent 23 fois la valeur du PIB !


Mettre les banques au service de la société


   Les gouvernements successifs ont renoncé à faire de véritables réformes pour stopper cette dérive inquiétante. La principale mesure doit être la séparation totale des activités de banque de détail et de banque d’investissement. Les économistes sont unanimes : la loi Glass-Steagall, votée par l’administration Roosevelt en 1933, a largement contribué à la disparition des crises bancaires aux États-Unis jusqu’en 1999, année où cette loi a été abrogée. Cette mesure a un triple avantage : réduire la taille – et donc le pouvoir – des banques, limiter la capacité de celles-ci à spéculer avec l’argent des épargnants, et renforcer la stabilité du système bancaire.

Assainir le monde des banquiers est une autre priorité. En imposant d’abord le plafonnement des revenus des traders et des dirigeants bancaires, dont les niveaux indécents sont une provocation pour le reste de la société. La gouvernance des banques doit également être réformée. Ces dernières sont exclusivement gouvernées par leurs actionnaires et des dirigeants cupides dont le seul mobile est le rendement financier. Les banques doivent être pilotées de manière démocratique par tous les acteurs concernés par leurs activités – usagers, salariés, représentants de la société civile, actionnaires. Ceux-ci doivent participer à parts égales aux instances de direction des banques. Ce contrôle social des banques est le meilleur moyen de les mettre au service de l’intérêt général. Il est également essentiel que se développent les banques coopératives, éthiques et publiques dont l’objectif n’est pas le pur profit.

   Les banques doivent aussi contribuer au budget de l’État, au même titre que toutes les entreprises. Un système de taxation progressif selon la taille des banques, et ciblé en particulier sur les activités spéculatives, est nécessaire. La fiscalité, outil de justice sociale, est aussi un instrument efficace de lutte contre la spéculation, en taxant notamment les transactions à haute fréquence, inutiles et dangereuses. Enfin, il faut, sans délai, mettre fin aux pratiques d’incitation et de soutien à l’évasion fiscale. Obliger les banques à rendre publiques des informations sur leur activité dans les paradis fiscaux et judiciaires, comme le prévoit la loi bancaire de 2013, est insuffisant : il faut interdire toute activité dans ces zones de non-droit qui sont le cancer du système financier international.


Fraude fiscale : le livre noir des banques

L’évasion et la fraude fiscale sont organisées par les banques : c’est ce que montre à nouveau le scandale HSBC. Les banques françaises ne sont pas en reste, à commencer par BNP Paribas. Attac, qui publie cette semaine Le Livre noir des banques en partenariat avec Basta !, exige la fermeture des filiales des banques françaises dans les paradis fiscaux, à commencer par les îles Caïmans.


Le rebondissement du scandale HSBC, déjà mise en examen en France pour blanchiment de fraude fiscale, confirme l’ampleur de la fraude fiscale pratiquée par les 1 % les plus riches, du notable de province aux malfrats en passant par des chefs d’entreprises, des artistes, des sportifs et des hommes politiques.

50 000 comptes secrets auraient été ouverts en Suisse par des résidents français, dont 6 000 comptes à la banque HSBC (8 231 selon Hervé Falciani, l’informaticien à l’origine des révélations) dont seulement 3 000 identifiables. L’actuel ministre du budget, Christian Eckert, a indiqué en 2013 que seulement 0,2 % d’entre eux étaient déclarés. Le montant des fonds cachés dans ces comptes de résidents français est évalué à 5,7 milliards d’euros.
Bien que disposant des fichiers depuis 2009, Bercy a saisi la justice pour… 62 cas, au motif que de « nombreux » délinquants ont régularisé leur situation. Mais Bercy n’a récupéré que… 300 millions d’euros de recettes fiscales en 4 ans de travail sur la liste.

Venant après les révélations du « LuxLeaks » sur l’ampleur de l’évasion fiscale pratiquée par les multinationales, l’affaire HSBC montre ce qui devrait être la priorité d’une vraie réforme fiscale : il n’y a pas qu’en Grèce que les privilégiés ne paient pas d’impôt.

Elle montre aussi le rôle majeur joué par les grandes banques dans la fraude et l’évasion fiscales, comme le montre Le Livre noir des banques d’Attac qui sort ce 11 février en librairie. Ce livre est le résultat de plusieurs mois d’enquête. Chiffres et exemples à l’appui, il montre le coût des banques pour la société et retrace l’histoire de conflits d’intérêts et de collusions incroyables, d’une capture idéologique inouïe, de responsables politiques et administratifs sous influence. La finance a bien un visage, celui d’une oligarchie bancaire plus que grassement rémunérée, coupable d’un véritable hold-up planétaire…

Si HSBC ou l’Union des Banques Suisses ont été prises la main dans le sac, les banques françaises participent elles aussi pleinement à ce jeu de l’évasion fiscale. Attac demande depuis plusieurs mois à BNP Paribas de fermer immédiatement ses filiales dans les paradis fiscaux, à commencer par les îles Caïmans où elle détient pas moins de 15 sociétés.


Lettre ouverte de Thomas Coutrot à François Hollande

Au Conseil Européen de décembre, ne tuez pas la Taxe Tobin européenne


    Au moment où les coupes budgétaires frappent les services publics, les prestations sociales, les investissements d’avenir et la solidarité internationale, la France va-t-elle sanctuariser la finance la plus spéculative ? C’est Michel Sapin qui l’a dit : taxer l’ensemble des transactions financières, comme le demandent la Commission Européenne et le gouvernement allemand, serait « un fantasme dangereux ou un rêve futile » (Les Échos 3/11). La France veut limiter la taxe Tobin européenne aux seules actions et à une infime partie des produits dérivés, épargnant ainsi l’immense majorité des transactions les plus spéculatives.


   Au prétexte d’arguments techniques dénués de pertinence selon la presse financière elle-même, le gouvernement français veut en fait préserver les bénéfices de nos « champions » nationaux, BNP, Paribas et la Société Générale, leaders mondiaux dans la spéculation sur les dérivés actions. Quitte à se priver de recettes s’élevant à, au moins, 9 milliards d’euros par an, selon les estimations les plus faibles. Quitte aussi à laisser se gonfler encore davantage la bulle spéculative déjà inquiétante.


   Le désaccord entre la France et ses partenaires sera tranché au Conseil européen de décembre. Nous demandons à François Hollande de laisser vivre la taxe Tobin européenne. L’heure est venue d’instaurer en Europe une TTF large, dont les recettes seront décisives pour financer les urgences sociales et, au plan international, l’adaptation au changement climatique et la lutte contre les pandémies. »


Thomas Coutrot: 59% de la dette publique est illégitime

   Qu’est-ce que la dette publique ? A qui profite-t-elle ? Et comment peut-on vraiment la résorber ? le Collectif pour un audit citoyen de la dette publique publie un audit précis de la dette française. Thomas COUTROT nous éclaire sur cette dette qui sert parfois de prétexte aux pires décisions politiques.

Thomas COUTROT est l'un des trois porte-parole d'ATTAC.


                                  Audit citoyen de la dette publique

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Le collectif pour un audit citoyen de la dette publique vient de publier son analyse de la dette de notre pays. Vous la trouvez ici en libre téléchargement.
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